Chronique d’une mort annoncée : sous prétexte de « rupture de confiance » avec une asbl pourtant co-gérée et contrôlée depuis toujours par la Commune, le Bourgmestre Vincent Scourneau a annoncé ce lundi 28 mars en Conseil communal son intention de mettre fin au contrat-programme du Centre culturel à partir de 2023.

Déclaration choquante car elle signifie la mise à bas d’une institution rayonnant depuis 50 ans à Braine-l’Alleud, le licenciement d’une équipe d’une dizaine de travailleurs, alors que la majorité politique porte une responsabilité écrasante dans le pourrissement d’un conflit qui aurait dû être
géré dans l’intérêt du public brainois.

On retrouvera les rétro-actes détaillés du dossier par ailleurs. Les trois principaux arguments avancés aujourd’hui par le Bourgmestre pour reprendre la politique culturelle sous le contrôle intégral de l’administration communale sont l’instruction en cours, la « rupture de confiance » et l’impossibilité de réformer le modèle « Centre culturel ».

Instruction en cours

Suite à l’audit péniblement bouclé en octobre 2021, malgré la réponse point par point communiquée par le Centre culturel et la confirmation que la Fédération Wallonie-Bruxelles n’y trouvait rien à redire, la Commune a commandité à un avocat pénaliste une note qui force grossièrement et unilatéralement le trait des conclusions de l’audit en montant en épingle les « risques potentiels » (et donc non avérés) de manquements de gestion pour l’année 2019.

La Commune a ensuite déposé le dossier chez le Procureur du Roi qui a mandaté un juge d’instruction pour débrouiller l’affaire. Corentin Roulin, conseiller communal et par ailleurs membre du Conseil d’Administration, a déclaré « accueillir l’instruction avec soulagement » et se dit « complètement serein sur ce qui sortira d’une lecture détaillée et impartiale d’un audit qui a fait « pschitt » ».

A noter qu’entretemps, l’asbl a continué à fonctionner, a immédiatement pris en compte toutes les recommandations de l’audit dans ses procédures de gestion interne et a produit des comptes dûment contrôlés et approuvés pour les années 2020 et 2021.

Rupture de confiance

La question qui a été posée au Bourgmestre est : rupture de confiance avec qui ? Avec le Conseil d’Administration ? Alors que depuis au moins 20 ans, la majorité politique communale se reflète dans une majorité absolue au sein de ce Conseil d’Administration ?

Le pouvoir communal est aux manettes depuis toujours. Il a juste perdu cette majorité absolue l’été passé lors du dernier renouvellement partiel du Conseil d’Administration avec désormais seulement 9 représentants sur 18. Il est vrai que les membres de l’Assemblée générale étaient remontés suite à la gestion calamiteuse de la crise interne qui avait débouché sur la fin du contrat de la Directrice appréciée de tous depuis 12 ans et qui n’avait d’aucune manière démérité.

Rupture de confiance avec la Direction ou l’équipe ? Il n’y a pour le moment qu’une directrice faisant fonction et l’équipe s’est renouvelée pour moitié suite à plusieurs départs : il y avait l’occasion de reprendre les choses en mains, de retisser des liens, de rebâtir un projet. La majorité communale n’a donné aucun signe de vouloir le faire. L’Echevine n’a pas convaincu, pour autant qu’elle ait même cherché à convaincre, les membres de la majorité ont ostensiblement boycotté les réunion du Conseil d’Administration pendant des mois, pour pratiquer ensuite une abstention systématique depuis leur retour. En vrai, le pouvoir communal n’a pas levé le petit doigt.

Le modèle « centre culturel »

Un Centre culturel, c’est la rencontre, au service de la culture dans un territoire, des moyens de la gestion communale et de la vigueur du tissu associatif local. Ce modèle, défini dans un décret de la Fédération Wallonie-Bruxelles, suppose au moins une collaboration, au mieux une connivence entre Commune et Centre culturel.

Il exige aussi une autonomie dans la définition et la concrétisation d’une politique culturelle adaptée aux particularités de la population locale, en lien avec celle-ci au travers notamment d’un Conseil d’Orientation qui nourrit l’équipe d’animation de ses réflexions sur les thématiques pertinentes. Le Bourgmestre estime qu’il n’a pas assez de contrôle sur la gestion de l’asbl. Il estime sans doute aussi que le Centre culturel se montre trop autonome. En tous cas, il n’a guère envoyé de messages ou de demande précises quant au contrôle de gestion.

Il a juste communiqué, après des mois d’atermoiements, un projet de refonte des statuts « à prendre ou à laisser ». Projet que l’Echevine de la Culture n’a pas daigné présenter ou commenter en Conseil d’Administration mais qui sera prochainement soumis au vote de l’Assemblée générale qui est souveraine sur ce point.

Que dit ce projet, à part que l’Echevine de la culture devrait être présidente de droit du Conseil d’Administration ? Il dit que les membres de l’asbl devraient payer une cotisation de 100 euros par an et que les représentants politiques devraient pouvoir opposer leur veto (veto politique donc) aux adhésions de nouveaux membres. Un contrôle total du politique. Très probablement imbuvable.

La décision d’un seul homme

Mais le Bourgmestre n’attendra pas ce vote et ne tentera sans doute même pas de faire passer ce texte. Il a donc décidé de faire sans le Centre culturel, de snober le subside annuel de plus de 200.000 euros de la Fédération Wallonie-Bruxelles et les autres avantages liés, de rompre unilatéralement le contrat-programme (avec quelles indemnités de dédit et après quelle débauche d’énergie et d’argent en notes d’avocats ?) et de reprendre le contrôle total en créant un service communal de le culture.

Politique et culture ne font pas bon ménage : nous, Ecolos, défendons une vision partagée, ouverte et participative de la culture, au service d’une variété de publics, dans un éventail de formes d’animation et de propositions qui réjouissent, émeuvent et font réfléchir les citoyens. Avec le sabordage du Centre culturel de Braine-l’Alleud et de son équipe, c’est cette vision qui est condamnée par une décision qui reste celle d’un seul homme, désormais fort éloigné de la possibilité de dialogue après vingt ans d’exercice ininterrompu du pouvoir.

Articles précédents sur ce sujet :