Chaque mois apporte son lot de nouvelles sur les effets néfastes des pesticides sur la santé, surtout celle des agriculteurs, mais aussi celle de toute la population et celle d’espèces précieuses pour la biodiversité comme les abeilles.
Selon une étude américaine de la revue « Occupational and environmental medicine », les agriculteurs mais aussi les particuliers qui utilisent les pesticides auraient deux fois plus de risques de développer des tumeurs cérébrales et même trois fois plus de risques de souffrir d’un « gliome » (forme de cancer du cerveau) que les personnes non-exposées.
Les agriculteurs et les riverains vivant près des champs encourent également plus de risques que le reste de la population de développer une maladie de Parkinson.
La France vient d’ailleurs d’adopter un décret reconnaissant la maladie de Parkinson comme maladie professionnelle pour les agriculteurs. Avec ce décret, la maladie de Parkinson rejoint les autres pathologies déjà reconnues dans le tableau des maladies professionnelles du régime agricole en France. Elle établit donc explicitement un lien de causalité entre cette pathologie et l’usage de pesticides.
En Belgique également, on doit être attentif à l’enjeu sanitaire que représente l’exposition à ces produits qui sont étroitement liés à certaines pathologies (dysfonctionnement hormonal et endocrinien, baisse des capacités immunitaires, réduction du taux de fertilité, certains types de cancer).
Ecolo souhaite encourager et soutenir les professionnels (entreprises de jardin, jardiniers professionnels…), les particuliers, les pouvoirs publics et les agriculteurs qui s’engagent vers une sortie progressive de l’usage des pesticides.
À cette fin, nos parlementaires travaillent aujourd’hui sur deux propositions législatives au Parlement fédéral et au Parlement wallon : l’une, à l’initiative de Thérèse Snoy, à la Chambre, pour encadrer la vente des pesticides et biocides (produits utilisés à l’intérieur des bâtiments, contre les insectes, ou autres « nuisibles ») destinés aux particuliers, l’autre, à l’initiative d’Olivier Saint-Amand au Parlement wallon, pour réduire l’usage de pesticides dans les espaces publics communaux et signaler par affichage les espaces traités malgré tout par des pesticides.
A la Chambre, le débat est bien avancé et cette proposition s’intègre dans un ensemble de mesures gouvernementales qui visent à mieux protéger le consommateur, mais aussi à lui donner des choix alternatifs pour gérer sa maison et son jardin.
Pour l’usage des pesticides agricoles, il y a une évolution indéniable. Les agriculteurs sont beaucoup plus incités et obligés à la prudence par des mesures de protection comme l’obligation de porter masques et gants, le contrôle des pulvérisateurs, la diminution des quantités pulvérisées, des règles de bonne pratique… Mais dans certains cas, les substances utilisées sont plus toxiques, même à faible dose. On peut citer le cas de graines (lin, maïs, betteraves) enrobées d’un insecticide (néonicotinoïde) qui perturbe le système nerveux des abeilles et leur fait perdre le sens de l’orientation.
C’est pourquoi Ecolo demande aux ministres en charge de l’agriculture et de la santé de mener une politique beaucoup plus volontariste de réduction de l’utilisation des pesticides dans le cadre de l’agriculture et de la production. Mais l’essentiel des décisions se prend au niveau européen et il faut donc du temps et une volonté politique largement partagée.
Une des solutions est bien sûr le passage au « bio » qui évite l’utilisation des pesticides et travaille à restaurer la qualité biologique du sol pour que les plantes se défendent elles- mêmes. Cette transition vers le bio est un pas que des agriculteurs de plus en plus nombreux franchissent ; on vient d’atteindre le chiffre de 1.000 exploitations en bio en Wallonie (sur 14.000 à peu près), elles se situent plus fréquemment dans la partie sud de la Région, la partie herbagère et moins dans les terres de grande culture que sont la Hesbaye et le Brabant . Des aides spécifiques supplémentaires aux aides européennes sont accordées pour faciliter cette transition.
Ici à Braine-l’Alleud, nous ne connaissons pas (encore) d’exploitations « bio » (à part une culture de céréales de 3 ha à Bois-Seigneur-Isaac par un collectif bruxellois) mais il y a plusieurs initiatives professionnelles de maraîchage bio dans des communes proches.
Pour éviter les atteintes à la santé des riverains des parcelles agricoles, que pouvons-nous suggérer au niveau communal ?
Au nom de la santé publique, il nous semble légitime que la commune organise une concertation avec les agriculteurs pour :
- soutenir les pratiques de bon sens: éviter toute pulvérisation en période venteuse (pratique déjà conseillée par les règlements européens), éviter les jours de congé où les gens sont dans leur jardin;
- diffuser une information préalable aux épandages par le placement d’affiches à proximité des champs avec consignes de comportements pour les riverains (fermer les fenêtres, ne pas laisser les enfants au jardin…);
- placer des bandes tampons, plantées de divers mélanges herbes et fleurs, entre les habitations et les parcelles de culture. On peut déclarer cela comme « Mesures agri-environnementales » pour financer le manque à gagner; il y a de fortes chances que l’Europe impose bientôt que 7 % des surfaces soient consacrées à l’écologie et à la biodiversité. On peut demander au niveau local que ces surfaces soient justement situées en bandes le long des lotissements;
- promouvoir le passage au bio et donc des informations, formations et aides publiques pour y arriver. La commune peut ajouter des coups de pouce supplémentaires aux aides wallonnes. Elle peut aussi aider les agriculteurs qui passent en bio à trouver des débouchés locaux…
- si des lieux habités par des publics fragiles, comme des crèches, des écoles, des homes, … sont voisins directs de parcelles de grande culture, définir des zones d’exclusion d’épandage, avec une éventuelle indemnisation pour l’exploitant.
C’est pour cela que nous avons déjà proposé dans ce journal de créer une commission communale de l’agriculture où ces propositions pourraient être discutées dans une ambiance constructive et de compréhension mutuelle.
Cette commission pourrait aussi diffuser une information générale à la population sur les obligations que les agriculteurs doivent respecter sur la base des directives européennes et des « bonnes pratiques agricoles » mais aussi sur le respect que les particuliers doivent avoir pour les terres exploitées.
Le problème est aussi dans nos maisons et nos jardins
L’utilisation accrue de biocides dans les habitations est l’un de facteurs qui explique l’augmentation du nombre de pathologies cancéreuses chez les enfants.
Une partie des herbicides que nous utilisons dans nos jardins ou sur nos trottoirs ruisselle directement dans les égouts et pollue l’eau, ce qui rend l’épuration plus difficile et plus onéreuse.
Et pourtant, le pourcentage de pesticides utilisés dans les jardins amateurs et de biocides utilisés dans les maisons ne cesse d’augmenter…
Dès lors, que peut-on faire au niveau de la commune pour réduire voire éliminer ces substances ?
L’exemple de Court-Saint-Etienne
En février 2012, la commune de Court-Saint-Etienne a lancé un projet participatif baptisé « Quartier en santé… sans pesticides ». L’objectif est de remplacer les substances nocives par des méthodes plus respectueuses de la nature, de l’environnement et de la santé humaine.
Pour soutenir des initiatives par quartier, la commune s’est engagée à se passer de pesticides dans les espaces publics et 400 habitants se sont rassemblés autour du même objectif du « zéro » pesticides.
Pour plus d’informations, voir sur le site de la commune de Court-St-Etienne
Les jardiniers communaux
Pour éviter une prolifération d’herbes non désirées, les jardiniers de la commune peuvent utiliser la technique du paillage dans certains parterres (recouvrir le sol avec des copeaux de bois provenant des déchets de tailles de la commune).
Les commerçants
La commune peut encourager les détaillants et les grandes surfaces qui vendent ces produits à indiquer clairement, par affichage ou par conseil, le caractère dangereux de certains produits et à proposer des alternatives.
Les outils pédagogiques
Des documents pédagogiques et ludiques (par exemple un jeu de cartes, des fiches pour proposer une solution écologique à chaque problème rencontré…) peuvent être mis à la disposition de tous les Brainois.
Des programmes de sensibilisation peuvent être organisés régulièrement dans les écoles.
Les encouragements
Encourager les initiatives citoyennes avec des cadeaux verts, compostières, plantes, arbres à planter.
Et puis surtout, nous pouvons tous agir individuellement, pour réduire ou supprimer l’utilisation de pesticides et biocides dans nos jardins et nos maisons.
De nombreux sites d’associations (ADALIA, Natagora, ecoconso…) proposent de nombreux trucs et astuces ainsi que des conseils pratiques pour y parvenir.
En voici quelques-uns :
- http://www.ecoconso.be
- http://www.coccinelles.be
- http://www.natureaujardin.be
- http://www.natpro.be
- http://www.gestiondifferenciee.be
- http://www.pesticide.be
Thérèse Snoy